L’économie nationale reste toujours plongée dans une situation de crise profonde en raison de la faiblesse des plans d’urgence mis en œuvre dans le contexte successif des lois de finances complémentaire et initiale pour atténuer les effets de cette dernière. Les réformes longtemps reportées sont devenues désormais coûteuses financièrement, socialement et politiquement, mais incontournables, ce qui pose la question de leur modulation dans le temps. Quoi qu’il en soit, l’urgence est là et le besoin d’accélérer la cadence de la mise en œuvre du Plan de relance se fait de plus en plus sentir, notamment chez les opérateurs économiques.
Le ministre de l’Economie et de la Planification a récemment levé le voile sur les mesures d’urgences économiques, mettant le paquet sur le soutien aux entreprises et à l’investissement. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’un plan de relance de l’économie nationale, présenté comme la consécration d’une volonté politique de prendre énergiquement en mains l’économie. Un plan tant de fois promis et qui tarde à être exécuté faute d’une vision stratégique. Il avait, faut-il le rappeler, pour but de définir la doctrine économique de l’Etat, mais aussi les priorités et les échéances en matière de réalisations.
Cet objectif officiellement proclamé n’est pas nouveau. L’exécutif a beau dire à maintes reprises que les plans de relance sont censés remettre l’économie tunisienne sur les rails tout en les projetant dans l’avenir, mais en réalité, tout est en effet à concevoir en matière de politique économique tant la contrainte financière des dix dernières années avait relégué cette question importante, au rang de préoccupation subalterne.
La réussite du plan de relance économique tant attendu est tributaire de l’adoption d’une méthode cohérente permettant la mise en place de profondes réformes structurelles avec un planning réaliste daté.
Les véritables réformes structurelles économiques n’ont pas commencé jusqu’à aujourd’hui, et il est difficile, après une léthargie de plus d’une décennie, de redresser le bateau, en une année. Car, les bilans socio-économiques successifs des années écoulées sont restés mitigés, voire négatifs, du fait de la crise qui a perduré, où la Tunisie navigue à vue au gré des conjonctures et des facteurs endogènes et exogènes.
Dialogue économique public-privé
Le Conseil des Chambres mixtes de commerce et d’industrie a salué les mesures d’’urgence visant à booster la relance économique annoncées par le ministère de tutelle. Il a souligné également l’importance d’accompagner ces mesures par des textes d’application. Il a réitéré son souci de favoriser un dialogue économique public-privé permanent afin de concevoir un programme national d’appui à la relance économique et financière, l’amélioration du climat de l’investissement et la préservation de l’emploi.
Dans le même ordre d’idées, la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (Conect) a appelé le gouvernement à appliquer les mesures d’urgence économique. Des mesures qui sont de nature « à rétablir la confiance avec les opérateurs économiques dans un contexte marqué par la baisse de l’investissement et l’augmentation du taux de chômage».
Elle a, par ailleurs, appelé à la nécessité de publier les textes d’application des lois relatives à l’économie sociale et solidaire, au financement participatif et à l’auto-entrepreneuriat et de lever les freins entravant le développement du secteur des énergies renouvelables.
La confédération a également jugé indispensable de mettre en place les mécanismes nécessaires afin de développer le secteur du transport et d’améliorer la compétitivité du secteur du textile industriel afin qu’il puisse créer de la richesse.
Aplanir les entraves bureaucratiques
De par ces mesures d’urgence, la réforme de l’administration tunisienne demeure la mère des réformes. La levée des entraves bureaucratiques est fondamentale pour l’attraction des investissements et la relance de l’économie nationale. Outre la lourdeur des procédures administratives, d’autres problématiques doivent être résolues en allant de l’avant dans la lutte contre la corruption et toute sorte de malversation, des fléaux qui ont porté atteinte à l’image du pays et à l’économie tunisienne.
A cet égard, de nombreux experts et spécialistes en la matière ont plaidé pour la protection de l’économie nationale et des intérêts économiques du pays, en veillant au respect de la législation et règlements en vigueur relatifs à la circulation transfrontalière des marchandises, à la lutte contre le trafic illicite, la contrebande, le blanchiment d’argent …
L’heure aujourd’hui est aux grandes réformes structurelles pour parvenir à la redynamisation de l’économie et la mise en place d’un nouveau modèle économique, et ce, à travers le renforcement de la production nationale, la contribution à l’amélioration du climat des affaires et à l’assainissement des domaines économique et commercial, la concrétisation d’une politique commerciale maîtrisée vis-à-vis de nos partenaires à même de servir les intérêts stratégiques de notre pays…
Mettre en place un pilotage rationnel
Le pays a besoin d’un plan de relance flexible, diversifiée, et à même de répondre aux défis de l’emploi et de la réduction de la pauvreté. Car l’économie nationale continue malheureusement à s’affaiblir d’année en année sous le poids les rigidités structurelles, de la corruption, de principes doctrinaux obsolètes et sans fondement, de l’absence de vision et de fortes résistances à mettre en place un pilotage rationnel. Et pour preuve, le taux de croissance économique est resté faible au cours des dix dernières années, la valeur de la monnaie nationale a chuté de façon continue et tous les voyants au rouge…
Dans sa dernière étude économique consacrée à la Tunisie, l’Ocde a indiqué que le PIB devrait se redresser lentement, tandis que l’inflation pourrait s’accélérer en 2022, sous l’effet de l’évolution de prix sur les marchés mondiaux des matières premières, outre les goulots d’étranglement au niveau des chaînes d’approvisionnement et des tensions salariales dans le secteur public. Elle a jugé, par ailleurs, indispensable de réduire la vulnérabilité financière et de garantir la stabilité macroéconomique qui reste menacée par plusieurs facteurs dont le niveau élevé des déficits budgétaires, la balance des paiements, l’encours de la dette, et la montée de l’inflation.
Dans le même contexte, l’étude recommande de contenir la masse salariale du secteur public, de réformer les entreprises publiques et le système de subventions, et d’améliorer l’intégrité et le respect des obligations fiscales. «Un environnement politique stable fondé sur la démocratie et l’Etat de droit est essentiel à la croissance économique».